Gambie: le président sortant Jammeh décrète l'état d'urgence

Par kibaru
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Le président gambien sortant Yahya Jammeh a proclamé ce mardi l'état d'urgence, invoquant "l'ingérence étrangère" à deux jours de l'investiture prévue de son successeur élu, Adama Barrow.

Intervenant à la télé gambienne, il a dénoncé "un niveau d'ingérence étrangère exceptionnel et sans précédent" dans le processus électoral et les affaires gambiennes, ainsi que "l'atmosphère hostile injustifiée qui menace la souveraineté, la paix et la stabilité du pays".

Yahya Jammeh, qui dirige le pays d'une main de fer depuis 22 ans, affirme vouloir rester en place tant que la justice n'aura pas statué sur ses recours électoraux, malgré les pressions internationales pour qu'il cède le pouvoir jeudi après l'expiration de son mandat.

La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a notamment prévenu à plusieurs reprises qu'elle pourrait avoir recours à la force en dernier ressort. Déjà, l’on annonce que des mouvements de troupes sont à signaler à la frontière sénégalo-gambienne.

A la demande de la CEDEAO, le Sénégal accueille depuis dimanche le président élu en attendant son investiture, pour laquelle il a assuré qu'il serait en Gambie.

Le Nigeria, poids lourd régional et continental, a affirmé de son côté accélérer ses préparatifs militaires aériens. Certains militaires nigérians sont même arrivés à Dakar aujourd’hui.

- Fuite des populations et Rapatriement de touristes -

Selon la Constitution, l'état d'urgence dure sept jours lorsqu'il est proclamé par le chef de l'Etat, mais peut être porté à 90 jours avec l'approbation de l'Assemblée nationale, qui l'a entériné mardi.

La proclamation, formulée en termes très généraux, "interdit de se livrer à des actes de désobéissance aux lois gambiennes, à l'incitation à la violence, ou troublant la paix et l'ordre public".

Yahya Jammeh a également ordonné aux forces de sécurité de maintenir l'ordre.

La Grande-Bretagne et les Pays-Bas, les deux pays qui comptent le plus grand nombre de touristes en Gambie, ont conseillé à leurs ressortissants d'éviter de s'y rendre ou d'en repartir s'ils s'y trouvaient, sauf raison impérative.

Auparavant, quatre nouveaux ministres gambiens, ceux des Affaires étrangères, des Finances, du Commerce, et du Tourisme, ont démissionné, a indiqué une source proche du régime.

Les ministres de l'Information et des Sports avaient été remplacés la semaine dernière.

Des changements sont également intervenus dans l'armée: des officiers refusant de soutenir M. Jammeh contre M. Barrow, comme le leur demandaient des commandants de la Garde républicaine, chargée de la protection du président sortant, ont été arrêtés dimanche soir, selon une source de sécurité.

Face aux risques de guerre civile ou d'intervention militaire extérieure, le flot de Gambiens quittant le pays depuis le début de l'année grossissait sensiblement, à l'approche de l'échéance de jeudi, selon des témoins. Beaucoup ont fui vers le Sénégal ou la Guinée-Bissau.