Match truqué en Espagne-Cheikh Saad: «Je veux que la vérité éclate»

Par kibaru

Cheikh Saad, footballeur mauritanien de 26 ans, a dénoncé la corruption présumée qui a entouré la défaite suspecte de son club, Eldense, en troisième division espagnole face au Barça B (12-0). Une enquête est en cours et l’entraîneur d’Eldense a été arrêté. Malgré les menaces, Cheikh Saad a accepté d’évoquer les coulisses de ce match au micro de RFI. Il dénonce notamment ses coéquipiers corrompus et réclame des sanctions.

Cheikh Saad, vous avez très vite dénoncé que certains de vos coéquipiers d'Eldense avaient refusé de se battre contre Barcelone en échange d'argent... Quand avez-vous compris ce qui se tramait ?

J'ai d'abord était frappé par le score... 12-0, ce n'est pas un score normal. J'avais déjà été surpris, une demi-heure avant le coup d'envoi, en apprenant que je ne serais pas aligné, alors que j'étais censé jouer. Dès la fin du match, alors que je me rendais vers l'autocar, deux joueurs m’ont confirmé qu'il y a eu un arrangement. J'ai pu ensuite récupérer un fichier audio qui prouvait la corruption. A partir de là, j'ai décidé de parler, car je veux que la vérité éclate et que ceux qui ont mal agi paient pour cela. Il y a des joueurs qui ont pleuré à la fin du match alors qu'ils s'étaient laissé corrompre !

Avec cette défaite, Eldense a été relégué en quatrième division, six journées avant la fin du championnat…

Nous savions déjà que nous allions descendre en quatrième division. Le problème n'est pas là. Nous allions descendre, d'accord, mais il fallait le faire en continuant à se battre jour après jour, en essayant d'apporter quelques motifs de satisfaction à nos fans. Mais pas en perdant de la manière que nous l'avons fait le week-end dernier.

En dénonçant les faits, vous ne vous êtes pas fait que des amis. Vous recevez même des menaces...

J'ai reçu des menaces, c'est vrai, mais je referais ça sans problème s'il le fallait. Je veux que cette affaire touche à sa fin et qu'on en finisse avec les matches arrangés, que ce soit en troisième division, en première ou n'importe où.

De toute évidence, plusieurs personnes connaissaient les faits, mais il n'y a eu que vous pour prendre la parole publiquement. Pourquoi vous ?

J'ai reçu une bonne éducation. Mes parents m'ont toujours dit qu'il fallait dire la vérité. Qu'on doit être humble et ne pas chercher à se vendre au plus offrant.

Quelles seront les conséquences de cette affaire pour votre carrière ? Elle peut conduire à ce que certaines portes s'ouvrent ou se ferment ?

Je n'ai pas agi par calcul, en espérant ou en craignant quelque chose. J'ai voulu agir pour que ce genre de choses ne se produise plus. Si les choses doivent évoluer en ma faveur ou non, ça ne doit dépendre que de mon travail sur le terrain. Et là, pour réussir, je fais de gros efforts, de gros sacrifices, et je suis persuadé qu'à la fin, je finirai par en tirer de bonnes choses.

Comment êtes-vous arrivé de la Mauritanie, où vous êtes né il y a 26 ans, à jouer dans le football espagnol ?

Je suis natif de Nouadhibou, puis mon père est parti travailler en Espagne, à Roquetas de Mar, dans la province d'Almeria. Toute la famille l'a rejoint là-bas. Je n'avais que sept ans, et c'est là, à Roquetas, que j'ai commencé à jouer au football. Plus tard, nous avons tous déménagé à Lérida, en Catalogne, où mes parents habitent toujours. Je suis arrivé jusqu'à l'équipe première de Lérida, en troisième division, où je suis resté trois saisons, avant de commencer à tourner dans toute l'Espagne et même en Lettonie, où j'ai été champion en 2015.

Rfi