Ce que m’inspire l’interview du Président Issoufou M. dans Jeune Afrique

Par kibaru

La dernière interview du Président de la République, Chef de l’Etat, Son Excellence ISSOUFOU MAHAMADOU, parue dans l’hebdomadaire Jeune Afrique, la semaine dernière, a suscité de la part des internautes avec lesquels je partage certaines plateformes de discussions des prises de position qui demandent à être révisiter. Les publications de ces internautes sont, de mon point de vue, soit une interprétation volontairement tendancieuse des propos du Chef de l’Etat, soit inutilement véhémente par défaut d’informations sur la participation du Niger au processus de stabilisation du Sahel et particulièrement du Mali.

Quand on isole certains propos de l’interview, en les sortant de leur contexte, il est difficile de ne pas y voir de la mauvaise foi ou à tout le moins de l’ignorance de la part des journalistes et de ceux qui s’y sont penchés pour y trouver matière à polémiquer. Connaissant le Président Issoufou, aucun problème ne se serait posé s’il s’était agi d’une critique constructive ou d’une analyse scientifique de ses propos. Si c’était le cas, sans doute que l’intéressé les aurait félicités connaissant bien son inclinaison aux débats d’idées et aux critiques qui font avancer des causes d’intérêt général. En effet les convictions constantes du Président Issoufou et les efforts qu’il déploie au quotidien pour la paix, la stabilité et l’unité des pays du Sahel ne souffrent plus de doute pour les esprits bienveillants. Toutes les personnes de bonne foi le lui reconnaissent.

Venons-en au contenu des publications des deux frères internautes qui m’ont sorti de mon long silence sur le net. Le premier titre : « Issoufou-Kidal : un dérapage inutile ». La deuxième publication, même si elle n’a pas de titre, rejoint la première à quelques variantes près. Tous les deux frères se sont plaints de ce que le Président Issoufou aurait affirmé que « le statut actuel de Kidal est une menace pour le Niger. L’Etat malien doit impérativement y reprendre ses droits ». Dans le reste de ses propos que j’invite à lire, le Chef de l’Etat a été assez explicite pour peu qu’on soit objectif et bien informé. Il y a des régions au Sahel qui sont sanctuarisées par des organisations criminelles et terroristes qui prennent ainsi en otage les populations qui y vivent et les états. C’est le cas des régions du centre et du nord du Mali dont la région de Kidal. Ces organisations travaillent à empêcher ou ralentir le retour de l’état du Mali malgré l’existence des accords d’Alger de 2015 pour la conclusion desquels la communauté internationale et les belligérants ont consenti d’énormes sacrifices. C’est le lieu de rappeler le rôle que le Niger (ses dirigeants et ses populations) a joué dans cette œuvre de stabilisation du Mali, puisqu’il n’a pas été suffisamment mis en avant à mon goût. Depuis la résurgence de cette crise en 2012, tout le Niger s’est mobilisé pour jouer une partition des plus honorables. Peut-il en être autrement d’ailleurs sachant que des continuités historiques, humaines, géostratégiques, socio-économiques, nous unissent au nord du Mali depuis au moins 8000 ans… ? Le Niger et les nigériens n’ont pas essayé de travestir cette histoire et se sont ouverts à leurs frères pour les accueillir. C’est en respect à cette réalité qu’en 2014 le Secrétaire Général de l’ONU a demandé officiellement au Niger de s’impliquer spécifiquement dans le rapprochement des communautés du nord du Mali, pour faciliter la signature et la mise en œuvre des accords d’Alger. Le Niger s’y est investi et ce jusqu’aujourd’hui sous la férule du Président Issoufou Mahamadou et du Premier Ministre Mr Birgi RAFINI. Ce processus a permis de mieux gérer les conflits inter et intracommunautaires. Nos frères de Kidal le savent et ils ont maintenu une relation fraternelle assidue avec nos deux dirigeants. Ils connaissent donc la pensée des deux hommes. Je puis en témoigner puisque je fais partie de ceux qui sont mobilisés afin d’aider à stabiliser le Mali et je puis affirmer, avec tout le risque que cela comporte, que le Niger est le seul pays dans la sous-région dont l’unique agenda est de ramener la paix et la stabilité au Mali et au Sahel en général.
Sur la question du nord Mali, le Président Issoufou est resté constant. Son combat est de débarrasser les pays du Sahel de toutes ces organisations terroristes et criminelles dont l’objectif est tout simplement de semer la mort, la haine et la désolation. Pour tout le mal que ces individus sans foi ni loi commettent contre les populations et nos pays, il n’y a d’autre solution que de les combattre avec détermination. Quand le chef de l’état dit que certains terroristes qui attaquent le Niger se replient dans la région de Kidal, qui est devenue ainsi un de leurs sanctuaires, il reste cohérent et fidèle à son combat auquel il appelle les uns et les autres, car cette situation cause aussi des torts aux populations de Kidal et à celles du Mali dans son ensemble.

Le Président Issoufou entretient des relations très fortes, voire très intimes avec les autorités maliennes, et les responsables et leaders d’opinion de Kidal. Son message est de constituer avec tous, sans exception, un large front de lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Le Chef de l’Etat est, par ailleurs comme chacun le sait très attaché au respect du principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation qui est aussi un principe défendu par l’Union Africaine. Il est et demeure toujours un panafricaniste convaincu pour qui, la seule perspective qui reste à l’Afrique est celle de s’unir, de former une entité homogène pour être plus forte dans un contexte où toutes les Nations du monde tendent vers des grands ensembles. Le débat sur les frontières devrait nous convaincre qu’elles ne sont pas un frein si nous en avons une bonne compréhension et si nous avons l’intelligence de les transcender. Armé de cet état d’esprit, nous pouvons chacun dans sa sphère lutter pour que nos états soient forts et parés contre toutes les manipulations d’ordre stratégiques dont le but est de détourner nos nations de leur vocation innée : la solidarité dans la diversité.

Je pense personnellement que tel est l’état d’esprit du Président Issoufou Mahamadou et cela guide son action panafricaniste dont l’illustration magistrale a été le tout dernier sommet de l’Union Africaine à Niamey. Ce n’est donc pas un fait du hasard si ses pairs des pays africains l’ont désigné Champion de la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAf), un processus qu’il a conduit avec foi et détermination. J’en ai eu l’heureuse illustration, en tant que citoyen nigérien, lors de mon dernier séjour à Addis Ababa entre le 29 juillet 2019 et le 1er aout 2019, dans le cadre de mes activités d’expert sur certains mécanismes de l’UA sur les populations autochtones. Au siège de l’Union Africaine où j’étais, le Niger est célébré pour la qualité du dernier sommet qu’il a abrité. Les africains ont découvert un grand pays, ouvert et accueillant, sans doute un héritage lié à sa vocation panafricaniste elle-même extraite de la position géostratégique de notre pays. Ce sommet et son principal animateur le Président Issoufou ont réconcilié le Niger et son histoire.
Ceci étant dit, comment peut-on soupçonner le Président Issoufou de chercher à nuire à telle ou telle communauté ? Sans aucun doute, notre devoir à tous est de l’aider à unir toutes les communautés, mettre fin aux divisions et à la balkanisation de notre continent. Notre devoir est aussi de nous unir tous contre le terrorisme à Kidal comme ailleurs. Ne déplaçons donc pas le débat et concentrons-nous sur le vrai problème qui est bel et bien celui que nous posent les organisations terroristes et mafieuses qui attaquent les populations et les pays du Sahel. Chacun doit clairement se déterminer : il s’agit d’être pour ou contre le terrorisme. C’est la ligne de démarcation entre amis et ennemis.

Mohamed EWANGHAYE DIDANE
Chercheur