Il n'y aura pas de second tour au Burkina Faso : Roch Marc Christian Kaboré a rassemblé 53,49% des voix dès le premier, selon les résultats provisoires.
Pendant la campagne pour la présidentielle au Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré a martelé qu’il ferait «un coup KO», qu’il gagnerait dès le premier tour. Seul, face à tous les autres candidats à l’élection présidentielle lors de cette élection qualifiée d’historique. Pari réussi : il a rassemblé 53,49% des voix, selon les résultats provisoires. Son principal rival, Zéphirin Diabré est à 29,65%, le suivant à 3,09%.
Toute la journée de lundi, le Burkina Faso a retenu son souffle avant la publication des résultats provisoires. Une attente fastidieuse à mesure que la Céni, la commission électorale, égrainait des résultats, centre de compilation après centre de compilation. A la vue des premiers résultats partiels, il a semblé que la question ne serait pas de savoir qui participerait au second tour, mais s’il allait y en avoir un. Au fil de la journée, le sentiment s’est transformé en certitude. Roch Marc Christian Kaboré a largement dominé ses adversaires.
Au siège du MPP (Mouvement du peuple pour le progrès de «Roch»), on était persuadé de la victoire bien avant la publication des résultats provisoires. Dans un couloir du siège de campagne, Salifo Tiemtoré, secrétaire à l’organisation du parti, montrait ses textos reprenant les résultats locaux venus de tout le pays. Le parti a compilé lui-même ses résultats. Et, «vers midi, on a eu la certitude qu’on était au-dessus des 50%», confiait-il. «Nos adversaires nous ont sous-estimés».
Non loin, au siège de l’UPC (Union pour le changement) de Zéphirin Diabré, le plus sérieux rival à la présidentielle et qui était le chef de file de l’opposition, la déconfiture était difficile à déglutir. «Nous savons que notre candidat va gagner, donc on gagne, on gagne, on gagne !», s’époumonait Moussa Billa, un militant, comme si sa volonté pouvait changer le cours des choses. A côté, Boureima Zonon, grinçait : «Les chefs du MPP sont des grands manipulateurs, ils étaient avec Blaise Compaoré. C’est la continuité du régime, ils sont partis avec l’âme du CDP (le parti de Compaoré)».
Pays sous couvre-feu
Une critique récurrente faite à Roch Marc Christian Kaboré. Ex-Premier ministre, ex-président du CDP et ex-président de l’Assemblée nationale, il a rompu définitivement avec le régime seulement dix mois avant que Blaise Compaoré soit chassé par une insurrection populaire. Kaboré est parti avec deux autres barons pour former le MPP. Ce qui fait dire à ses détracteurs de l’opposition que c’est un opportuniste, et aux fidèles de «Blaise» que c’est un traître qui les a poignardés dans le dos.
Il a fallu attendre tard le milieu de la nuit pour que les résultats provisoires soient officialisés. A 00h10, le président de la commission électorale a solennellement annoncé la victoire de Kaboré. Quelques minutes avant, Diabré était au siège de campagne du MPP pour reconnaître sa défaite et féliciter son adversaire. Une attitude conciliante applaudie par les militants du MPP à l’extérieur.
Kaboré s’est ensuite pressé de sortir devant le siège de campagne paré de draperies orange, la couleur du parti. Ses partisans ont alors exulté. Calme, comme à son habitude, Kaboré a pris la parole quelques minutes. Il a félicité les autorités de la transition et appelé à «se mettre au travail immédiatement». Pas le temps de faire la fête pour ses militants. Depuis le coup d’Etat manqué du 16 septembre, le pays est sous couvre-feu. L’allocution de Kaboré terminée, les militants se sont immédiatement dispersés dans un concert de klaxons pour être chez eux avant une heure du matin.
Libération