Le tribunal correctionnel de Nanterre a condamné une quinquagénaire à dix-huit mois de prison avec sursis pour avoir exploité sa cousine pendant cinq ans à Châtenay-Malabry. La jeune fille originaire du Mali était contrainte de travailler plus de 15 heures par jour sans repos ni rémunération.
Voilà douze ans qu'Astan, une jeune femme originaire du Mali victime d'esclavage moderne, réclame justice. C'est chose faite. Le tribunal de Nanterre a condamné ce lundi une femme de 54 ans à 18 mois de prison avec sursis pour avoir réduit en esclavage domestique une adolescente malienne pendant cinq ans dans un appartement situé à Châtenay-Malabry, dans les Hauts-de-Seine.
Le tribunal correctionnel a suivi les réquisitions du procureur et assorti cette peine de 60.000 euros de dommages et intérêts pour la jeune victime, aujourd'hui âgée de 31 ans, et d'un euro pour le Comité contre l'esclavage moderne, qui s'était porté partie civile. La prévenue était poursuivie pour «exécution d'un travail dissimulé», «aide à l'entrée ou au séjour irréguliers d'un mineur étranger en France» ainsi que pour «soumission d'un mineur à des conditions de travail et d'hébergement indignes».
Violences physiques et psychiques
Astan n'a que 13 ans lorsqu'elle arrive en France en 2000 et s'installe dans la demeure familiale de l'une de ses cousines. «Elle avait promis au père de la jeune fille, issu d'un milieu très pauvre au Mali, qu'elle ferait des études et aurait une vie meilleure», raconte dans les colonnes du Parisien l'avocate de la plaignante, Juliette Vogel. Un rêve pour l'adolescente qui va rapidement se transformer en cauchemar. Au lieu d'être scolarisée, Astan est réduite à la servitude domestique pendant près de cinq ans.
«Elle travaillait jusqu'à 18 heures par jour sans repos, n'a jamais été rémunérée et ses papiers d'identité lui ont été confisqués. Elle s'occupait de l'entretien du foyer qui pouvait compter jusqu'à neuf personnes et sortait uniquement pour aller chercher les enfants à l'école ou faire les courses. Elle dormait sur un matelas à même le sol et subissait régulièrement des violences physiques et psychiques», énumère l'avocate de la partie civile.
Ce n'est qu'en octobre 2005 que la jeune fille parvient à quitter le domicile sur le conseil d'un jeune garçon rencontré dans un cours d'alphabétisation. Rapidement épaulée par le Comité contre l'esclavage moderne (CCEM), elle décide de porter plainte un an plus tard contre sa logeuse. Entendue au cours de l'enquête, la prévenue âgée de 54 ans a affirmé avoir versé de «l'argent de poche» à l'enfant, nié les coups et la privation de nourriture. Elle a également assuré que l'adolescente faisait des travaux ménagers «comme l'ensemble des enfants». Pour le procureur, le travail forcé d'Astan est «incontestable». «Au lieu de vivre comme une enfant, d'aller à l'école, d'avoir des amis, des loisirs, elle a fait le ménage», a-t-il déclaré lors du procès.
lefigaro