Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité une résolution créant un régime général de sanctions pour le Mali où les entraves au processus de paix et de réconciliation se multiplient.
"Il s'agit d'une demande explicite du gouvernement malien" et "de donner un nouvel élan à l'accord de paix" qui est "sérieusement menacé", a déclaré l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre.
A ce stade, aucun individu ni entité n'est identifié pour être visé par des sanctions sur des voyages ou des gels d'avoirs.
Le texte prévoit la possibilité d'interdictions de voyages et de gels d'avoirs. L'adoption de la résolution va être suivie de la création à l'ONU d'un comité de sanctions pour identifier les individus ou entités contrevenant à ses dispositions et d'un panel d'experts devant s'assurer du respect des sanctions.
La désignation d'individus ou d'entités sera liée à des violations du cessez-le-feu, à des obstructions à la mise en oeuvre de l'accord de paix, à des attaques contre les forces armées maliennes ou les Casques bleus, à des violations des Droits de l'Homme ou des obstacles à l'acheminement d'aide humanitaire.
Alors que des pays comme la Russie ou l'Ethiopie avaient fait part de réserves sur l'opportunité d'un tel texte, la France, rédactrice du texte, s'est employé à les rassurer en soulignant qu'à ce stade il n'est question que de créer un régime général de sanctions et que l'identification de contrevenants n'interviendra qu'ultérieurement.
La résolution se borne à cet égard à rappeler les nombreuses violations du cessez-le-feu ayant accompagné la mise en place de l'accord de paix signé en 2015 entre le gouvernement et des groupes armés réunis au sein d'une plateforme.
Elle dénonce aussi les violences qui ont touché le pays ces derniers mois et l'importance que conservent des mouvements armés jihadistes comme Al-Qaïda au Magrheb islamique (Aqmi), Al-Mourabitoun, Ansar Eddine, ou le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), déjà visés par des sanctions.
Situation volatile
Le Conseil de sécurité "est gravement préoccupé par la situation sécuritaire volatile, notamment par le développement d'activités criminelles et terroristes dans le centre et le sud du Mali comme par l'intensification des trafics de drogue et d'êtres humains" dans le pays, est-il écrit dans la résolution.
Pour certaines capitales européennes, le Mali est aujourd'hui "dans une période presque pré-insurrectionnelle" à moins d'un an d'une élection présidentielle. "Il y a la crise au nord, la crise au centre, et maintenant une crise de régime", relève sous couvert d'anonymat un responsable européen. "C'est un régime qui ne sait pas où il va, qui est uniquement tourné vers la réélection du président", ajoute-t-il. Pour la crise au centre, il cite entre autres l'absence de l'Etat malien, la fermeture d'écoles remplacées par des des madrassas coraniques et le non-fonctionnement des tribunaux.
Au cours des derniers mois, la violence a redoublé au Mali avec des violations répétées de cessez-le-feu et des attaques contre des Casques bleus présents dans le pays pour accompagner l'accord de 2015.
En dépit d'une présence militaire française et de celle de l'ONU, le pays reste un lieu de passage pour des trafics en tous genres et le théâtre d'actions de force de groupes jihadistes armés.
L'armée malienne n'a guère la capacité de les neutraliser et l'Etat malien dirigé par Ibrahim Boubacar Keïta peine à combattre la corruption et faire fonctionner institutions et administrations.
Pour la France qui souligne qu'un régime de sanctions a été demandé par le Mali lui-même dans une lettre en août, l'objectif de sa création est d'abord "dissuasif" et vise à éviter un déraillement complet du processus de reconstruction du Mali.
"L'impunité encourage une culture de corruption dans laquelle les trafics et les intérêts criminels peuvent prospérer et contribuer à l'instabilité et à l'insécurité", souligne ainsi la résolution.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda. Ces groupes ont en grande partie été chassés en 2013 à la suite d'une intervention militaire française qui se poursuit encore actuellement. Mais des zones entières du pays échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères.
Avec AFP