Dans un rapport publié, le vendredi 22 septembre dernier, Amnesty international déplore le fait plus de 150 000 enfants ne peuvent pas aller à l’école en raison du manque de sécurité dans le nord et le centre du Mali. Intitulé « Mali: Violations and abuses as instability spreads », ce rapport intervient en prélude de l’examen de la situation des droits humains dans ce pays par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies.
Publié en prévision de l’Examen périodique universel (EPU) du Mali en janvier prochain, ce rapport révèle qu’en juin 2017 plus de 500 établissements scolaires étaient fermés dans les régions où des groupes armés sont actifs, notamment celles de Gao, Kidal, Ségou, Mopti et Tombouctou. Certains, en particulier dans le centre du pays, ont été forcés à fermer après que des membres de groupes armés aient menacé leur personnel.
Selon Amnesty International : « Alors que le Mali célèbre aujourd’hui le 57e anniversaire de son indépendance, les autorités doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la fermeture d’écoles et assurer la sécurité des enfants et du personnel scolaire ».
Conditions de détention « effroyables »
Le rapport attire par ailleurs l’attention sur les conditions de détention « effroyables » à la prison centrale de Bamako et dans d’autres prisons en dehors de la capitale. Lors d’une visite de la prison de Bamako en avril 2017, les autorités carcérales ont indiqué à Amnesty International que 1 200 personnes y étaient détenues et devaient dormir à tour de rôle en raison de l’espace limité. Cette prison a une capacité de seulement 400 détenus.
Amnesty International a confirmé que les conditions à la prison centrale de Bamako ne s’étaient pas améliorées depuis ses dernières visites, en 2013 et 2014. À titre d’exemple, elle indique qu’aucune des personnes arrêtées et inculpées d’actes terroristes depuis 2013 n’est autorisée à faire de l’exercice en dehors des cellules, qui sont surpeuplées et mal ventilées.
15 personnes toujours détenues en otages
En novembre 2015, des groupes armés ont tué 19 civils lors du siège de l’hôtel Radisson, à Bamako, au cours duquel plus de 150 personnes ont été prises en otage. Celles-ci ont été libérées lorsque les forces de sécurité sont intervenues. Amnesty International a été informée par des organisations travaillant sur le terrain au Mali qu’au moins 15 personnes, de nationalité malienne ou étrangère, sont actuellement retenues en otage par des groupes armés.
Violation des Droits de l’homme
Depuis le début de l’année 2017, les attaques commises par des groupes armés dans le centre et le nord du pays sont en augmentation, y compris celles visant des imams, des chefs de villages et des représentants de l’État, et ont donné lieu à de nombreuses atteintes aux droits humains et violations du droit international humanitaire.
Le 18 janvier 2017, Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) a attaqué le camp du Mécanisme opérationnel de coordination à Gao. Plus de 70 personnes ont été tuées, dont des civils. Le 18 juin 2017, quatre civils ont été tués au cours d’un attentat contre un hôtel de la périphérie de Bamako perpétré par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) affilié à AQMI et regroupant tous les mouvements jihadistes au Sahel.
Persistance de l’impunité
En 2013, à l’issue du dernier EPU concernant le Mali, celui-ci a accepté la recommandation qui lui a été faite par le Conseil des droits de l’homme d’amener les groupes armés à rendre des comptes pour les graves atteintes aux droits humains. Cependant, l’ONG déplore le fait que la situation n’ait guère progressé. Pour elle, l’impunité persiste pour les atteintes aux droits humains et les violations du droit international humanitaire, telles que les homicides, la torture et les pillages, surtout lorsqu’elles sont commises dans le cadre du conflit actuel. Par conséquent, les victimes et leurs proches ne peuvent obtenir vérité, justice et réparation.
Amnesty International appelle les autorités maliennes à créer la commission d’enquête internationale prévue par l’accord de paix d’Alger. Cette commission devra mener des enquêtes efficaces dans les meilleurs délais sur les allégations faisant état d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées et d’autres crimes de droit international aux mains des forces de sécurité maliennes et des groupes armés.
Complément d’information
La 29e session du Groupe de travail sur l’EPU du Mali se déroulera en janvier 2018. Le Mali a accepté 111 recommandations lors de son EPU de 2013, dont celles d’initier l’interdiction des mutilations génitales féminines (MGF), de protéger les enfants du recrutement par des groupes armés et d’enquêter sur les exécutions extrajudiciaires.
Il a toutefois rejeté 14 recommandations, notamment celles prévoyant des enquêtes sur les allégations d’exécutions extrajudiciaires de Touaregs et de torture aux mains des services de sécurité de l’État.