Face à l'enfer libyen, les ONG exhortent l’UE à "revoir en urgence" leur politique migratoire

Par kibaru
Des milliers de migrants sont détenus en Libye. La plupart ont été interceptés en mer par des gardes-côtes après avoir tenté d'embarquer pour l'Europe. Crédit : Reuters

 

 

Les ONG ont renouvelé leur appel aux États européens pour la mise en place d’une politique migratoire plus humaine. Elles demandent notamment de porter secours aux migrants coincés en Libye dans des conditions abominables.

 

Dix ONG internationales intervenant en Libye ont exhorté jeudi 24 mai l'Union européenne et ses États membres à "revoir en urgence" leurs politiques migratoires, soulignant que les migrants, "y compris les femmes et les enfants, sont sujets à des détentions arbitraires et illimitées" en Libye, dans des conditions "abominables".

Parmi les signataires du communiqué figurent notamment Première Urgence Internationale, Danish Refugee Council, International Rescue Committee, Mercy Corps ou Terre des Hommes.

"La communauté humanitaire est témoin chaque jour de la souffrance des migrants et réfugiés en Libye, où ils sont de plus en plus exposés à des risques immédiats alors que la violence continue de déstabiliser le pays", indiquent dans un communiqué commun les membres du Forum des ONG internationales pour la Libye.

Régulièrement en contact avec des migrants enfermés dans le centre de Zintan, en Libye non loin de Tripoli, InfoMigrants reçoit des témoignages éprouvants des prisonniers. Depuis plusieurs jours, les migrants  - de nationalité érythréenne pour la plupart - ne reçoivent plus de nourriture. Les photos reçues montrent des corps squelettiques. "Nous sommes le 22 mai. Les gardiens sont venus vers 4h du matin pour donner un peu d'eau. Nous avons eu droit à un verre chacun. C'est de pire en pire, nous avons faim, nous avons soif", a écrit l'un d'eux.

"Des vies sont en danger"
Les ONG dénoncent depuis des mois les accords passés entre l'UE et la Libye. "Les politiques migratoires de l'UE et de ses États membres, notamment le soutien aux garde-côtes libyens, contribuent indirectement au renvoi des migrants et réfugiés [dans le pays]. Ils finissent alors détenus [...] avec des chances quasi nulles d'exercer leur droit de demander l'asile" ou d'accéder à une "protection internationale", dénoncent ces ONG.

"Des vies sont en danger" en Libye, rappellent ces ONG, qui demandent la mise en place d'une politique globale pour "permettre l'évacuation humanitaire d'urgence de ceux détenus dans des centres de détention vers des espaces sûrs hors de Libye".

Les organisations internationales appellent aussi "les citoyens européens et la société civile à faire entendre leurs voix" sur ce sujet.

En 2017, l'Italie a conclu un accord, validé par l'UE, avec les autorités libyennes pour former et équiper les garde-côtes libyens. Un volet plus controversé, conclu avec des milices libyennes, avait permis une diminution drastique des départs à partir de juillet 2017.  La France, quant à elle, s’est engagée fin février à fournir gratuitement six embarcations rapides aux garde-côtes libyens, pour le contrôle des flux de migrants en Méditerranée.

Les agences de l'ONU et organisations humanitaires rappellent régulièrement leur opposition à ce que les migrants arrêtés en mer soient ramenés en Libye, où ils se retrouvent placés dans des camps de détention ou à la merci de milices.

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