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L’Afrique de l’Ouest, première région au monde à adopter un plan d’action pour mettre fin à l’apatridie

Par kibaru

Les Ministres de la Justice et de l’Intérieur des Etats membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont adopté aujourd’hui un plan d’action régional pour l’éradication de l’apatridie en Afrique de l’Ouest, au terme d’une conférence ministérielle organisée conjointement par la CEDEAO et l’UNHCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et accueillie par le Gouvernement de la République de Gambie. Les mesures détaillées assorties d’un calendrier contraignant visent à mettre fin à l’apatridie d’ici 2024 en s’attaquant aux obstacles à l'acquisition de la nationalité.

« Un million de personnes sont apatrides en Afrique de l’Ouest » a rappelé M. Volker Türk, Haut-Commissaire assistant pour les réfugiés. « Priver les individus de nationalité, c’est engendrer la souffrance, l’exclusion et la marginalisation », a-t-il précisé, ajoutant « de plus, on estime à au moins 30 pour cent de la population le nombre de celles et ceux qui, dans la région, n’ont pas de papier prouvant leur identité ou leur nationalité ».

« L’adoption du Plan d’action constitue une avancée majeure dans la lutte contre l’apatridie » a-t-il déclaré. « La région s’était déjà engagée dans cette lutte il y a deux ans. Elle se dote aujourd’hui d’un nouvel arsenal juridique plus complet et robuste contenant des mesures réalistes, adaptées aux réalités de l’Afrique de l’Ouest. Par ses actions courageuses, l’Afrique de l’Ouest se pose en leader de la lutte contre l’apatridie en Afrique et dans le monde ».

« Le Secrétaire général des Nations Unies considère l’éradication de l’apatridie comme une priorité dans ses efforts pour la prévention des conflits, la résilience et la promotion des droits humains » a rappelé Mohamed Ibn Chambas, Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel. « Cette réunion se pose à un moment décisif sur le chemin des progrès réalisés par la CEDEAO, les Nations Unies et le HCR en particulier, vers la mise en œuvre de la Déclaration d’Abidjan sur l’éradication de l’apatridie », a-t-il dit.

Le 25 février 2015, les 15 États membres de la CEDEAO ont adopté la Déclaration d'Abidjan qui reconnait l'apatridie comme un fléau en Afrique de l'Ouest et se sont engagés à mettre fin à ce phénomène d'ici 2024. Le Plan d’action régional adopté aujourd’hui s’appuie sur cette déclaration et s’articule autour de 3 chantiers : l’identification des apatrides et des risques d’apatridie, la prévention et la réduction de l’apatridie, et la sensibilisation du public.

 

En outre, le plan d’action énonce des mesures concrètes visant à tarir les sources de l’apatridie, en palliant aux insuffisances des lois sur la nationalité et aux défaillances en matière de preuve de la nationalité. « Certaines lois sur la nationalité contiennent encore des discriminations basées sur le genre ou l’appartenance ethnique et raciale », précise ainsi Liz Ahua, Représentante régionale du HCR pour l’Afrique de l’Ouest. « Ces discriminations constituent autant d’obstacles à l’acquisition de la nationalité pour les quelques 60 millions de personnes qui, dans la région n’ont pas de document d’identité et de nationalité », a-t-elle rappelé. Le Plan d’action prévoit l’harmonisation des lois sur la nationalité avec les normes internationales en matière de nationalité et de prévention de l’apatridie ». Les Etats devront ainsi mettre en place des mécanismes performants et adaptés pour garantir à toutes les personnes éligibles l’obtention de documents d’identité et de nationalité.

« L'apatridie a un impact dévastateur sur la vie des individus, car la possession de la nationalité est essentielle pour une pleine participation à la société et une condition préalable pour bénéficier des droits fondamentaux de l'homme. Je tiens à vous assurer de l’engagement de la CEDEAO à résoudre ce problème » a déclaré Dr Fatimata Dia Sow, Commissaire de la Commission de la CEDEAO chargée des Affaires sociales et du Genre.

« Il est important d’attirer l’attention sur l’apatridie comme nous le faisons car il s’agit d’un phénomène souvent invisible dont les conséquences sont néanmoins très importantes, y compris le déni d'accès aux droits fondamentaux de l'homme tels que l'éducation, la santé et le droit au travail » a insisté Mme Sow.

Les experts des Etats de la CEDEAO se sont réunis les 7 et 8 mai pour élaborer et valider le plan d’action avant de le soumettre aux Ministres pour validation. Ce document sera présenté aux prochaines réunions statutaires de la CEDEAO pour être entériné. Une fois ce processus finalisé, le plan d’action sera un document légalement contraignant pour les Etats membres de la CEDEAO.

A ce jour, douze des quinze Etats membres de la CEDEAO ont adhéré à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides, et onze états sont parties à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Le Ghana, le Cap vert et le Togo se sont engagés à adhérer aux conventions.   

L’action des Etats membres et de la CEDEAO s’inscrit dans le cadre de la campagne décennale pour l’éradication de l’apatridie, lancée par le HCR en 2014. A ce titre, le HCR offre son soutien technique pour l’organisation de la conférence régionale ministérielle de Banjul pour la validation et l’adoption du plan d’action régional sur l’éradication de l’apatridie en Afrique de l’Ouest.