Un jeune chercheur mauritanien aborde les maths en pulaar pour les rendre plus accessibles

Par kibaru

Rendre plus accessibles les mathématiques : tel est l’objectif visé par le jeune chercheur mauritanien, Mouhamadou Falil Sy, à travers son essai de mathématiques supérieures en langue pulaar : ’’Binndanɗe Hiisankooje’’ (éditions Papyrus Afrique).

’’L’objectif de cet essai est rendre les mathématiques plus accessibles, faciliter l’apprentissage des mathématiques (….)’’, a confié à l’Agence de presse sénégalaise, l’auteur, présent à Dakar dans le cadre d’une table-ronde sur le thème : ’’Génie descriptif des langues africaines comme facteur d’acquisition des sciences : exemple du pulaar’’. L’auteur part du caractère descriptif de la langue pour présenter quelques principes et outils de mathématiques supérieures en langue pulaar.

Il ne s’agit pas d’un exercice de traduction, mais de « pularisation » des concepts mathématiques. Car, explique t-il, « la correspondance d’un mot à un concept vient après une profonde analyse sur le concept mathématique, ses utilisations étant toujours au premier plan, mais tient compte aussi de la syntaxe du pulaar ».

La langue pulaar est structurée de sorte que les mots appartiennent à des classes, note Mouhamadou Fall Sy, soulignant que la classification en pulaar « est faite le plus souvent suivant par les propriétés physiques ou géométriques des objets à nommer ».

Ainsi, l’aspect-boucle sous-jacent à l’opération puissance ou factorielle fait que les mots pulaar associés à ces dernières sont classés « Ndé », qui décrit la rotondité, l’aspect « courbe » sera classé « Ngol », qui décrit la longueur. ’’Ceci devrait contribuer à rendre les concepts mathématiques plus naturels, et donc à faciliter leur compréhension », soutient-il.

L’ouvrage commence par une brève introduction aux opérations de la logique élémentaire et celles de la théorie des ensembles, puis viennent les ensembles de nombres. Il comprend une courte présentation des structures algébriques et aborde la topologie générale, les fonctions, l’espace Euclidien, la linéarité, des rudiments de la théorie de la mesure.

Dans un chapitre, l’auteur revient sur le dénombrement et les probabilités, les équations différentielles, de physique, de transformation de Fourier. Mouhamadou Falil Sy, fervent militant de la promotion des langues africaines, estime que l’apprentissage des sciences dans ces langues peut favoriser ‘’une excitation scientifique’’ dans les laboratoires.

En apprenant les sciences dans les langues africaines, « on permet ainsi au génie africain de s’exprimer », soutient l’auteur, estimant que cela peut contribuer aussi à la naissance d’un Einstein africain et de combler le retard du continent dans les domaines scientifiques.

Pour une large diffusion de l’ouvrage, la maison d’édition Papyrus Afrique veut tirer 1000 exemplaires, selon son directeur, Seydou Nourou Ndiaye qui espère aussi l’essai suscitera un intérêt pour les pouvoirs publics au plus haut niveau.

Mouhamadou Falil Sy est né le 23 janvier 1990 à Bélinabé, dans la commune de Kaédi en Mauritanie.

Après des études primaires à Bélinabé et ses études secondaires à Kaédi, où il a passé un bac C (spécialité Mathématiques) en 2009, il rejoint l’université de Cergy-Pontoise (France) pour ses études supérieures, indique une note de présentation de l’auteur.

Il y obtient une licence de Mathématiques en 2012 avec mention Très-Bien, puis une maîtrise de Mathématiques fondamentales et un master-recherche de Mathématiques fondamentales, tous avec mention Très-Bien. Il fut alors major de la promotion.

Il obtint pour 2012-2013 une bourse RATP, en 2013-2014 une bourse d’excellence de master-recherche et en juillet 2014 un prix au mérite en sciences par l’Académie de Paris. Il fut retenu avec dix autres étudiants par le programme DIM (Domaine d’intérêt majeur en mathématique) de la région Ile-de-France afin de préparer un doctorat de Mathématiques.

Actuellement Mouhamadou Falil Sy est jeune-chercheur en thèse de Mathématiques au laboratoire AGM de Cergy-Pontoise UMR8088-CNRS. Il travaille dans le domaine de l’analyse qualitative des équations aux dérivées partielles. En octobre 2015, il a reçu le prix « Actions Collaboratives » de la Banque CASDEN et de la FSMP.

Mouhamadou Falil Sy est un militant de la promotion des langues africaines dans le sillage de feu le Professeur Cheikh Anta Diop. Il ouvre à la formulation des sciences dans les langues africaines, car estimant qu’elles pourraient beaucoup contribuer à leur développement.

Senego