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Conférence d’Entente Nationale : La question de l’Azawad et la problématique du Centre toujours pas tranchées

Par kibaru

Les rideaux sont tombés hier dimanche 2 avril, au palais de la culture Amadou Ampathé Bah de Bamako, sur la Conférence d’Entente Nationale. Démarrée le lundi 27 mars dernier, le moins que l’on puisse dire c’est que cette rencontre est loin d’avoir comblé toutes les attentes des participants. De nombreuses questions sont restées en suspens. De quoi faire apparaitre chez les participants un sentiment de travail inachevé. Au nombre de ces zones d’ombre non élucidées encore figurent notamment la question de l’ « Azawad » et le règlement de la problématique du centre du pays en proie à une grave violence armée mettant dangereusement en cause les fondements de l’Etat. Ces deux questions ont été confiées à un comité d’experts et de sages. Celui-ci aura également pour tâche de se pencher sur un projet de charte pour la paix, l’unité et la réconciliation en se basant sur les éléments issus du rapport général.

Si tout le monde s’accorde à reconnaitre que la mauvaise gouvernance est l’une des principales causes de la résurgence des rébellions dans la partie septentrionale du Mali, aucun consensus ne s’est par contre dégagé sur les questions cruciales auxquelles devaient répondre la conférence d’entente nationale. En effet, le concept « Azawad » dont cette rencontre devait trancher est loin de faire l’unanimité. Ainsi, si les ex-rebelles s’attachent encore à donner à ce concept un statut politique et une dimension territoriale, d’autres participants à la conférence d’entente nationale veulent qu’elle soit tout simplement définie comme réalité socioculturelle, mémorielle et symbolique. D’aucuns ne partagent pas le fait que ce concept puisse englober sur le plan administratif l’ensemble des régions du Nord du Mali.

Des négociations avec Amadou Kouffa et Iyad Ag Ghali

Par ailleurs, la problématique du Centre devenu l’épicentre du terrorisme au Mali allant même jusqu’à remettre en cause la bonne cohabitation entre les communautés, a été largement débattue. C’est ainsi que certains participants ont formulé des recommandations allant dans le sens de l’élargissement des négociations à Amadou Koufa. Ils ont souhaité que les mêmes négociations soient adressées à Iyad Ag Ghali pour mettre fin au terrorisme dans le nord du Mali. Plusieurs autres propositions ont été faites pour une résolution des résurgences des rébellions cycliques dans le septentrion malien. Lesquelles traitent en priorité la question de la gouvernance à travers l’amélioration du secteur de la justice, l’audit et le suivi des ressources mobilisées pour le développement des régions du Nord, l’accélération du retour de l’administration, la fourniture des services sociaux de base, le retour des services financiers dans toutes les régions du Nord, la criminalisation des revendications basées sur les violences et les armes…  

Sur le plan de la sécurité, les participants ont mis l’accent sur le déploiement d’une armée reconstituée pour assurer la sécurité des personnes et de leurs biens, l’accélération du processus de désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion, l’accélération de la réforme du secteur de la sécurité, le retour des réfugiés et leur prise en charge, etc.

Journée nationale pour le pardon et la réconciliation

S’agissant de la promotion de la paix, diversité culturelle et la lutte contre l’exclusion, les participants ont beaucoup insisté sur la nécessité d’accorder plus de temps d’antenne aux communautés à l’ORTM, la prise en compte des valeurs culturelles de chaque région, le recours aux mécanismes traditionnels pour la prévention et la gestion des conflits, la promotion d’une discrimination positive en faveur des femmes, des jeunes et des handicapés, l'organisation d'un forum spécial pour les cinq régions du Nord, la commémoration d’une journée nationale pour le pardon et la réconciliation…

Concernant le développement socio-économique, ils ont proposé l’implication des associations de victimes, la réduction de l’écart de développement entre les régions du Nord et les autres, le soutien à l’émergence du secteur privé, la promotion de certaines valeurs telles que le travail, la justice et l’équité.

Les leaders de la rébellion s’attachent à l’ Azawad

A noter que l’absence de certains leaders de la rébellion à l’image de Algabass Ag Intalla et Bilal Ag Cherif a pesé sur la rencontre. D’ailleurs, réagissant sur le réseau social Twitter à l’issue de la cérémonie de clôture de la Conférence d’entente nationale, ce dernier a déclaré : « Nous ne saurions parler d'entente sans l'atteinte d'un consensus sur le statut politique de la région de l'Azawad ». Toutefois, il convient de préciser que les recommandations issues de cette rencontre seront consignées dans le rapport final qui sera transmis aux autorités, aux groupes armés, aux partis politiques. Ce sont les éléments de ce rapport qui serviront à la rédaction de la charte pour la paix, l’unité et la réconciliation. Il est donc clair que conformément aux doléances des ex-rebelles, cette conférence d’entente nationale n’est qu’une première étape d’un long et périlleux processus. Autant dire que son organisation, bien que prévue par l’accord, dans cette période n’est pas du tout opportune. Puisque sur le terrain, aucune des dispositions de l’accord, qui doivent le précéder n’a été appliquée correctement. C’est notamment le cas avec l’augmentation de l’insécurité, la non-opérationnalisation des patrouilles mixtes, la non-effectivité de l’installation des autorités intérimaires, la lenteur dans le redéploiement  des services de l’Etat, le retard dans le cantonnement des combattants… C’est dire qu’il reste encore du chemin à parcourir alors qu’on est à deux mois de la fin de la période intérimaire, prévue en juin prochain.