Une nouvelle fois, l’attaque d’un hôtel au Burkina Fasso porte la marque de Mokhtar Belmokhtar. Un homme qui a déclaré la guerre à la France.
Il y a deux mois, au Mali, c’était déjà lui. Mokhtar Belmokhtar et son groupe revendiquaient l’attaque de l’Hôtel Radisson Blu à Bamako. Même cible, même mode opératoire, bilan comparable (20 morts) et même signature ; Al Mourabitoune, Aqmi, al-Qaida au Maghreb islamique. Ce n’est pas l’État islamique qui est derrière ces attaques répétées, mais bien al-Qaïda, ou plutôt un homme, Belmokhtar, l’homme qui a déclaré la guerre à la France.
Il fait disparaitre le Paris - Dakar de la région
Cette guerre est un héritage familial. Belmokhtar a grandi dans le culte de son oncle combattant de l’indépendance algérienne. Ses parents lui ont donné le même prénom, en hommage au héros de la famille ; oncle paternel, Fellagah, dernier nationaliste algérien, décapité par les Français en 1959. La France, ennemi juré de la famille qu’il combat depuis 20 ans. Belmokhtar entre dans le djihad comme en religion. Il a 18 ans. Il part en Afghanistan combattre aux côté de Ben Laden. Il en revient en 1992 avec un œil en moins, arraché par un éclat d’obus. Il en gardera son surnom ; le Borgne. De retour en Algérie, il trouve un pays à feu et à sang après l’élection annulée du FIS, le Front islamique du salut. Belmokhtar va rejoindre les groupes islamiques armés dans sa région au sud et peu à peu prendre son autonomie.
Son premier coup d’éclat ? Faire disparaitre le Paris-Dakar de la région. Les organisateurs de la course veulent innover, faire partir le Dakar du Sénégal et arriver au Caire, devant les pyramides, après avoir traversé tout le Sahel. Belmokhtar va faire monter la pression et diffuse la menace d’une attaque sur les concurrents. Les antennes du Quai d’Orsay font remonter : il ne faut pas traverser le Niger, trop dangereux ! La "reco" est suivie… La course est annulée. Belmokhtar aura eu raison du Dakar. Dans les dunes le téléphone arabe fonctionne. Ici le patron, c’est lui. Autre élément fondateur, l’ouverture de la franchise al-Qaïda dans la région. Il sollicite Ben Laden contre l’avis des chefs islamistes locaux. Ben Laden enverra un émissaire pendant de longues semaines pour discuter de l’établissement d’une antenne al-Qaïda dans la région. Belmokhtar en deviendra le fer de lance.
Le Sahel est son jardin, et les rançons versées atteignent des records
Avant les autres, il va comprendre les bénéfices que l’on peut tirer des prises d’otages. En 2003, le versement d’une rançon de 5 millions de dollars en échange de la libération d’otages occidentaux est un record. Qu’importe les revendications politiques ; ce qui compte c’est l’argent pour faire la guerre. Le Sahel devient son jardin. Après chaque opération, il cache armes et butin dans les sables et lui seul connait les coordonnées GPS pour les déterrer et mener des opérations. Mais surtout, il va briser des tabous et se marier avec la fille d’un grand chef tribal malien ; ses lieutenants vont faire de même. Ce réseau va lui conférer pendant longtemps un coup d’avance.
Pendant des années, il aura su éviter la traque de l’armée algérienne ; mais avec l’opération française Serval, le combat va changer de dimension. Un vraie armée, 3500 hommes, appuyés par des hélicoptères, des moyens de renseignements satellites, des forces spéciales. Dans cette guerre, Aqmi va perdre beaucoup d’hommes et Belmokhtar beaucoup de ses lieutenants. Mais le Borgne est toujours là. Aujourd’hui, il a reconstitué ses forces et continue la guerre, contre cette France qu’il déteste tant, frappant partout où son armée se trouve dans le Sahel, dans les pays qui ont le tort de collaborer avec elle.
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