C'est en tout cas ce que révèle le contenu du rapport à mi-parcours dressé récemment par le Groupe d'experts de l'ONU sur la situation au Mali. En effet, la situation humanitaire, qui prévaut au Mali, ne cesse de se dégrader, de jour en jour. Cela, à cause notamment de l'insécurité et des violences qui se propagent dans de nombreuses zones du pays. Les enfants et les femmes, en raison de leur vulnérabilité, sont naturellement les plus touchés.
Ainsi, dans ce document, il a été indiqué que les populations civiles sont les premières à pâtir des violences intercommunautaires, des combats entre les groupes armés et des menaces terroristes. La situation s'est encore aggravée sous l'effet de la pandémie de COVID-19. A cet effet, il convient de préciser qu'entre juin et décembre 2020, la MINUSMA a recensé 575 attaques contre des civils, perpétrées sur l'ensemble du territoire malien. La zone la plus touchée par ces violences, est surtout la région de Mopti. Lors de ces attaques, 557 civils ont été tués, 625 blessés et 153 autres enlevés. En raison de l'insécurité croissante, le nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays a augmenté, passant de 250.000, en mars 2020, à quelque 311.000, en novembre de la même année.
A noter que les enfants, dont on estime qu'ils comptent pour 62% des déplacés du pays, sont toujours dans une situation d'extrême vulnérabilité. Déjà, en novembre 2020, 1230 établissements scolaires ont été fermés à cause de l'insécurité. Leur réouverture est parfois soumise à l'évolution des dynamiques internes des groupes armés ou à l'influence de groupes extrémistes, comme cela a été le cas à Tombouctou, plus précisément dans le cercle de Goundam.
Selon le même document, cette crise sécuritaire alimente de nouvelles formes de trafic, comme la traite d'enfants, particulièrement de garçons, à des fins d'exploitation de leur travail dans les mines d'or, notamment à Gao et Kidal. Dans ce même rapport, il a été indiqué que cette situation alimentait le recrutement et l'utilisation d'enfants par des groupes armés, et que le nombre de cas signalés de recrutements d'enfants par de tels groupes avait augmenté de 230 cas signalés au premier semestre de 2020. Les déplacements de populations, la clôture des établissements scolaires et les difficultés économiques ont rendu les enfants plus vulnérables à l'exploitation et à la traite.
Gao, le nouvel eldorado minier
Signalons qu'aux inquiétudes liées aux vols et à l'éventuelle infiltration des sites miniers par des groupes terroristes armés, s'ajoutent celles concernant les conditions de sécurité et le travail des enfants. Lesquels sont utilisés pour effectuer des tâches dangereuses dans les mines d'Intahaka (Gao), où ils concassent des pierres à la main. L'afflux d'enfants vers les mines s'explique en partie par la fermeture des établissements scolaires de Gao, à partir de mars 2020.
Il convient de préciser qu'en raison de l'intensité des activités au niveau de ces sites miniers, la région de Gao connait aussi un afflux massif de migrants venant d'horizons divers. Ainsi, selon l'OIM, le nombre de migrants, arrivant chaque mois à Gao, est passé de presque zéro, en avril 2020, à 4000, en novembre de la même année. Une situation qui ajoute aussi aux violences perpétrées par des hommes armés au sein de ces sites. L'intervention dans ces zones par des éléments de groupes armés impliqués dans le processus de paix ne viserait qu'à prélever des taxes plutôt que de sécuriser les lieux.
Outre les enfants malmenés, les femmes sont aussi très touchées par les violences qui sévissent dans certaines zones du pays, comme le Centre et le Nord. Ainsi, le nombre de cas de violences fondées sur le genre reste élevé. Entre janvier et septembre 2020, les mécanismes de protection en ont recensé 4411, dont 1443 cas de violences sexuelles, parmi lesquels 187 étaient liés au conflit. Les personnes qui ont subi ces violences sont à 99 % des femmes, dont 61% ont moins de 18 ans.
Farabougou, encore sous embargo
L'autre grande inquiétude majeure pour les humanitaires, demeure la situation très confuse qui règne dans la localité de Farabougou, cercle de Niono, région de Ségou. Malgré plusieurs tentatives de médiation, quelque 4000 civils sont privés de moyens de subsistance et d'aide humanitaire, depuis octobre 2020, en raison d'un blocus imposé par des groupes extrémistes. De plus, au cours de l'année écoulée, les intervenants humanitaires, leurs installations médicales et leur personnel ont été la cible de violences à Gao, Ménaka, Tombouctou et Mopti.
Pour autant, c'est du côté de Ménaka que les bonnes nouvelles arrivent, puisque grâce à l'initiative "Ménaka sans armes", l'insécurité a connu une baisse significative. C'est ainsi une petite note d'espoir, malgré le tableau sombre de la situation sécuritaire et humanitaire dans lequel le pays est plongé depuis un certain temps.