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Crise diplomatique : pourquoi le Soudan rappelle son ambassadeur en Egypte

Par kibaru
(Crédits : Reuters)

Le Soudan a décidé de rappeler pour consultations son ambassadeur en Egypte. Aucune raison officielle n’a été avancée mais depuis plusieurs années une crise diplomatique couve entre les deux pays en raison notamment d’un vieux conflit frontalier mais aussi le dossier du Barrage de la Renaissance sur le Nil. Des tensions qui ont été dernièrement amplifiées par la visite en grande pompe du président turc Erdogan au Soudan et qui font craindre une nouvelle escalade diplomatique entre les deux pays.

Nouvelle escalade dans la tension diplomatique qui couve des années entre Le Caire et Khartoum. Le Soudan a en effet décidé jeudi de rappeler « pour consultations »  son ambassadeur en Egypte, Abdoul Mahmoud Abdoul Halim.  L'information a été confirmée par le ministère égyptien des Affaires étrangères ainsi que par le porte-parole du ministère soudanais des Affaires étrangères, Ghareeb-Allah Al Khidir qui n'a toutefois pas donné les raisons de ce rappel.

A la suite de cette décision, un responsable de la diplomatie égyptienne a indiqué aux médias que son pays « va évaluer la situation en vue de lui apporter la réponse appropriée ». En somme, il faudrait s'attendre les prochains jours à des mesures de rétorsion de la part de la diplomatie égyptienne, ce qui va encore raviver et même amplifier la crise entre les deux pays. Depuis des années, l'Egypte et le Soudan sont empêtrés dans un conflit frontalier sur la région frontalière de Halayeb et Shalateen. Les territoires sur lesquelles porte le différend sont actuellement sous contrôle égyptien mais chaque année, le Soudan qui revendique la souveraineté de la région, réitère ses plaintes au niveau du conseil de sécurité de l'ONU pour une résolution internationale du dossier.

Divergences d'intérêts et risques géopolitiques

A ce dossier qui empoisonne déjà les relations entre les deux pays membres de la Ligue arabe et de l'Union africaine, est venu s'ajouter celui du barrage de la Renaissance que l'Ethiopie érige sur le Nil, ce à quoi s'oppose Le Caire. Le Soudan s'était porté comme médiateur entre les deux pays mais il y a quelques semaines, l'Egypte a annoncé son intention de récuser le Soudan pour « son impartialité » au profit de la Banque mondiale. « L'Egypte estime que la Banque mondiale est neutre et déterminante et qu'elle pourrait faciliter les discussions entre les deux parties, tout en évitant les interprétations et manipulations politiques » avait expliqué  Sameh Shoukry, le ministre égyptien des affaires étrangères qui s'était même récemment rendu en visite en Ethiopie afin d'écarter le Soudan du dossier.

C'est dans ce contexte que le Soudan a accueillit, fin décembre dernier, le président turc Recep Tayyib Erdogan qui a effectué une visite de deux jours à Khartoum avec à la clé la signature de plusieurs accords commerciaux. La visite a été vue d'un mauvais œil en Egypte dans le sillage de la crise du Golfe et surtout au regard des relations délétères entre le régime du maréchal Abdel Fattah Al Sissi et Erdogan qui n'a pas digéré le coup d'Etat du maréchal contre les frères musulmans en 2013. Et pour enfoncer le clou, le Soudan et la Turquie ont signé un accord pour la rénovation par Ankara de l'île de Suakin, contrôlée par le pays d'Omar El Béchir et située à coté de celle de Halayeb et Shalateen.

La conjugaison de ces facteurs à risques géopolitiques menace donc la stabilité de la région et au regard de la situation tendue, certains analystes craignent même que la crise diplomatique ne s'envenime davantage au regard des positions tranchées de part et d'autre.

En début octobre 2016 pourtant, le président soudanais Omar el-Béchir a effectué une visite au Caire au cours de laquelle il a signé avec son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi un accord stratégique de partenariat en plus de 17 autres accords dans différents domaines. Ce qui n'a pas empêché  Khartoum d'accuser l'Egypte d'ingérences dans ses affaires internes allant parfois jusqu'à suspendre l'importation de certains pays en provenance du pays.

latribune