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La finance islamique : un levier à exploiter pour le développement et la lutte contre les inégalités

Par kibaru

Le Groupe de la Banque mondiale et la Banque islamique de développement ont publié le premier rapport mondial consacré à la finance islamique. Intitulée en anglais Global Report on Islamic Finance — Islamic Finance: A Catalyst for Shared Prosperity?, cette publication examine en détail les perspectives de croissance de ce secteur et sa capacité à contribuer à la réduction des inégalités de revenus dans le monde, à un meilleur partage de la prospérité et à la réalisation des objectifs de développement durable.

Après avoir dressé un panorama de la finance islamique et mis en évidence les principales difficultés qui font obstacle à son expansion, le rapport préconise un certain nombre de mesures susceptibles de faire de ce secteur un levier du partage de la prospérité.

La finance islamique promeut une répartition juste et équitable des revenus et de la richesse. Parce qu’elle est très connectée à l’économie réelle et qu’elle repose sur le partage des risques, la finance islamique peut contribuer à l’amélioration de la stabilité du secteur financier. Elle peut aussi permettre d’intégrer au système financier formel ceux qui en sont actuellement exclus pour des motifs culturels ou religieux. Contrairement à la finance classique, la finance islamique est basée sur le partage des risques et les financements garantis par des actifs. Dans la finance islamique, les clients des banques détiennent directement des actifs réels dans la sphère réelle de l’économie, ce qui réduit leur aversion au risque.

Le rapport propose un cadre théorique pour l’analyse de l’économie et de la finance islamiques qui s’articule autour de quatre piliers fondamentaux :

  • une structure institutionnelle solide accompagnée de politiques publiques appropriées ;
  • une gouvernance prudente et des dirigeants responsables ;
  • la promotion d’une économie basée sur le partage des risques et l’esprit d’entreprise ;
  • l’inclusion financière et sociale.

Cependant, souligne le rapport, un certain nombre de mesures doivent être prises pour accroître l’efficacité de la finance islamique et mettre pleinement à profit sa capacité à réduire les inégalités. Ces actions sont les suivantes :

  • améliorer l’harmonisation, la mise en place et l’application des réglementations ;
  • créer des institutions qui fournissent des informations sur le crédit et d’autres sujets, afin de faciliter les financements par fonds propres, en particulier au profit des PME et des microentreprises ;
  • développer les marchés financiers et les ṣukuk (obligations conformes à la loi islamique) afin de favoriser le financement de grands projets d’infrastructure ;
  • assurer l’homologation réglementaire des produits financiers issus d’autres territoires de compétence et développer ainsi les marchés grâce à des transactions internationales. 

Les pistes d’action

Le secteur de la finance islamique est aujourd’hui très largement dominé par les activités bancaires, qui représentent plus de 75 % de ses actifs. Il est donc nécessaire qu’il s’étende à d’autres activités.

Pour autant, le rapport préconise un certain nombre de recommandations destinées précisément au secteur bancaire : établir un cadre de réglementation et de surveillance qui permette de gérer les risques systémiques d’un territoire de compétence à l’autre ; introduire des produits et des services de partage des risques novateurs plutôt que de copier les produits de la finance classique basés sur le transfert des risques ; harmoniser les règles de la charia et unifier les jugements rendus dans le domaine de la finance islamique dans les différents pays ; élargir l’accès à la finance islamique ; et, enfin, renforcer le capital humain et développer les connaissances de la population en matière de finance islamique.

Le rapport souligne aussi la nécessité de développer les marchés financiers islamiques. Ces marchés, qui sont encore relativement jeunes, pourraient permettre aux populations de se constituer un patrimoine au moyen des instruments de financement par fonds propres et de financement garanti par des actifs. Les marchés de type obligataire (ṣukuk) sont en particulier adaptés au financement des infrastructures et à la promotion de l’entrepreneuriat. Selon le rapport, il est indispensable de recourir à l’émission de ṣukuk souverains pour développer ce marché en général, mais aussi favoriser la transparence et l’efficacité dans la détermination des prix des actifs.

Les responsables publics devraient aussi s’attacher en priorité à développer les institutions financières non bancaires, actuellement sous-développées ou sous-utilisées. Par exemple, l’assurance islamique (takaful) pourrait améliorer l’accès des ménages et des entreprises aux services financiers.

Enfin, le rapport met en avant l’importance des institutions et instruments de la finance sociale islamique (qard hasan, zakat, sadaqat, waqf) qui sont enracinés dans les principes de redistribution des richesses et de la charité, et qui peuvent, à ce titre, contribuer à la lutte contre la pauvreté, en favorisant en particulier la constitution d’un filet de sécurité pour les personnes qui vivent dans une pauvreté extrême. Il recommande de mettre en place des systèmes de gouvernance en vue d’assurer un fonctionnement plus ordonné de ce secteur.

Selon le rapport, des institutions comme la zakat (l’aumône pour les pauvres) ou le waqf sont des viviers de ressources qui, s’ils étaient exploités, pourraient répondre aux besoins des personnes les plus démunies dans la plupart des pays d’Asie du Sud et du Sud-Est et d’Afrique subsaharienne.

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