La MINUSMA ferme ses derniers camps et quitte le Mali Des manœuvres diplomatiques au Mali

Interview du Chef de la MINUSMA suite à l'attaque contre les casques bleus à Kidal

Par kibaru

Monsieur le Représentant Spécial, nous sommes au lendemain d’une terrible attaque à Kidal, nous allons bientôt partir pour Kidal, c’est important pour vous d’aller voir vos équipes après un tel événement ?

Le Représentant Spécial du Secrétaire Général, Monsieur Mahamat Saleh Annadif : Comme je vous l’ai dit, je l’avais dit dans mon communiqué, ce qui s’est passé est révoltant. C’est odieux. Je ne sais pas quel terme est approprié pour le qualifier. Et donc, j’estime qu’il est de notre devoir après un tel acte irresponsable, inqualifiable, de se rendre vraiment auprès de nos collègues là-bas. D’abord, pour les réconforter après tout ce qui s’est passé, leur dire que nous sommes avec eux, que nous partageons leur peine. Il n’est plus question de se décourager. C’est quelque chose qui est dommageable, regrettable, odieux, mais c’est arrivé ; il faut essayer plutôt d’en tirer quelques leçons. Je veux aussi dire aux auteurs de cet acte que de toutes les façons, notre détermination à la mise en œuvre de cet accord, elle demeure totale, parce que personnellement, comme je l’ai dit dans le communiqué, le camp des ennemis de la paix se sent au désarroi, il jette ses dernières cartouches, pour pouvoir vraiment arrêter ce processus. Or, je l’ai dit et je le répète, il n’y a pas d’autre issue pour la paix au Mali sans la mise en œuvre correcte de cet accord.

 On sent une véritable détermination dans votre discours

La détermination, c’est la clef de la réussite. Il faut croire à ce qu’on fait, et ce qu’on fait est noble. Il est au service de nos frères maliens, il répond à notre mandat des Nations Unies. Nous représentons une noble organisation des Nations Unies qui a pour mission principale de faire régner la paix dans la monde ; et il faut être digne partout où on est de cette mission noble des Nations Unies. Il faut surtout lever haut le drapeau des Nations Unies ; c’est ce qu’on essaie de faire au quotidien, les hommes et les femmes qui, dans des conditions souvent difficiles que j’ai vues la semaine dernière, se battent jour et nuit, qui travaillent 7 sur 7, 24 heures sur 24. Il est de mon devoir de les encourager, de les inciter à faire encore davantage, afin que vraiment, nous puissions être à la hauteur de cette mission qui nous est confiée.

Cet évènement s’est déroulé 48 heures seulement après votre visite à Kidal, vraiment vous les avez tous rencontrés, ces soldats de la paix à Kidal

C’est ça qui est choquant! Quand je dis révolte, je parle d’une vraie révolte. Survient d’abord l’incident 48 heures après mon passage, une semaine après la rencontre CMA-Plateforme qui nous a donné un peu plus d’espoir pour dire que désormais, ils s’entendent sur la gestion de la ville et en filigrane, s’entendent sur la sécurisation et la défense de cette ville. Est-ce que ce n’est pas ça qui explique cela ? Est-ce que les ennemis de la paix n’ont pas senti que les choses ont commencé à bouger et qu’ils ont tout simplement voulu perturber cela ? Je me pose des questions.

Vous allez passer une bonne partie de la journée auprès de vos troupes, auprès des soldats de la paix, mais aussi auprès de tous les civils qui travaillent pour la Mission de la paix à Kidal. On sent que vous êtes un homme de terrain, vous venez de passer toute une semaine dans le nord. Ce n’était pas prévu de repartir et il y a eu cet évènement tragique. Vous aimez ça le terrain ?

Je n’aime pas le qualificatif ‘’homme de terrain’’. Quand on est dans ce genre de mission, il faut faire son travail, il ne faut pas se ménager, parce que c’est un travail difficile. Tout mon temps, je pense plutôt aux collègues qui sont sur le terrain, qui vivent dans des conditions difficiles, et si ce n’était pas ma semaine passée à leurs côtés, j’imaginerais mal dans quelles conditions ils vivent. J’ai un devoir de partage avec eux, un devoir de solidarité, un devoir d’entraide. Indépendamment d’être homme de terrain ou pas, je voudrais vivre les choses, je voudrais vraiment toucher les choses, je voudrais vraiment connaitre les choses parce que toutes les décisions que nous prenons dans nos bureaux, à partir de rapports que nous recevons, n’ont aucun sens si je ne touche pas cela concrètement. Je suis quelqu’un qui aime toucher du doigt, aime voir avant de croire. Donc, c’est en cela que j’estime que mon passage auprès de tous ces frères, auprès de tous ces hommes de troupe, qu’ils soient policiers, qu’ils soient militaires, qu’ils soient civils est pour moi extrêmement important.