Comme annoncé depuis mai dernier, lors de la visite du président français Emmanuel Macron à Gao, Bamako a abrité, hier dimanche 2 juillet 2017, un sommet extraordinaire des chefs d’Etat des pays du G5 Sahel. L’invité d’honneur de cette grande rencontre a été le président Emmanuel Macron pour son premier déplacement dans la capitale malienne depuis son élection à la magistrature suprême de son pays au mois de mai dernier. Parmi les annonces fortes issues de cette rencontre figure sans doute le déploiement effectif de la force conjointe du G5 Sahel au plus tard au mois de septembre prochain. Par ailleurs, il a également été indiqué que l’Agence française de développement (AFD) débloquera un montant de 200 millions d’euros pour cinq ans afin de soutenir les initiatives visant le développement des pays du G5 Sahel.
Pour une rencontre de tous les espoirs, le sommet extraordinaire du G5 Sahel à Bamako a tenu toutes ses promesses. Tous les chefs d’Etat des pays du G5 Sahel à savoir l’hôte de la rencontre et président en exercice de cette organisation, Ibrahim Boubacar Kéïta du Mali, Mohamed Ould Abdel Aziz de la Mauritanie, Mahamane Issoufou du Niger, Idriss Déby Itno du Tchad et Roch Mark Christian Kaboré du Burkina Faso ont répondu présents. Ainsi, des annonces fortes visant à soutenir la montée en puissance de la force conjointe du G5 Sahel ainsi que le développement de cet espace ont été faites. A rappeler que le déploiement de cette force chargée de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière a déjà été salué par la Résolution 2359 du Conseil de Sécurité des Nations unies, adoptée le 21 juin dernier. Un soutien confirmé lors de l’adoption de la Résolution 2364 renouvelant d’un an supplémentaire le mandat de la MINUSMA, deux jours plus tard. Cette force, comme a tenu à le rappeler le Président Macron, ne viendra pas se substituer à l’Opération Barkhane ni à la MINUSMA, mais en complémentarité à ces initiatives. Sous la direction du Général Didier Dacko précédemment chef d’état-major des armées du Mali, le commandement de cette force sera basé à Sévaré. Il aura également des représentations en Mauritanie, au Niger et au Tchad. Sur le plan des effectifs, avec un démarrage de 5.000 éléments, à terme 10.000 hommes issus des rangs de ses pays seront déployés. Dans un mémorandum signé en mai par les chefs d'état-major des cinq pays, dans un premier temps, il est attendu le déploiement de sept bataillons de 750 hommes, soit 5 250 militaires. Chacun des pays aura en charge son propre territoire, mais trois zones frontalières prioritaires ont été définies pour les opérations conjointes : un fuseau ouest, à la frontière Mauritanie-Mali ; un fuseau centre, aux frontières du Mali, du Niger et du Burkina et un fuseau est, à la frontière entre le Niger et le Tchad.
Sur chaque zone, les pays concernés devraient déployer un bataillon chacun, c'est-à-dire par exemple dans le fuseau centre, trois bataillons : un malien, un nigérien, un burkinabè. De même, le commandement de ces zones devrait être partagé, avec par exemple sur le fuseau est, un commandant tchadien et un adjoint nigérien.
Une pluie de millions de FCFA et une conférence des donateurs attendue dans les prochains mois
Notons que le financement global de cette force est estimé à 423 millions d’euros. Pour le moment, cette force peut compter sur le soutien accru de la France sur le plan financier et logistique. C’est ainsi que d’ici fin 2017, la France débloquera un montant de 8 millions d’euros en faveur de cette force. S’y ajoutent 70 véhicules tactiques et un appui opérationnel, promis par le Président Macron au cours de ce sommet. Ce n’est pas tout. La France a également promis de peser de tout son poids afin de mobiliser de nombreux partenaires pour le financement de cette force. Au nombre de ceux-ci figurent l'Allemagne, déjà impliquée dans le Sahel, les Pays-Bas et la Belgique. Cela, en plus d’autres organisations internationales et institutions financières. Déjà, l’Union européenne, par la voix de sa haute représentante pour les Affaires étrangères, Frederica Mogherini, qui était en visite officielle au Mali, le 5 juin dernier, a promis une aide financière de 50 millions d'euros. Par ailleurs, les Etats du G5 Sahel ne seront pas en reste puisque chacun devra débourser un montant d’environ 6 milliards de FCFA, soit 10 millions d’euros, pour financer cette force conjointe. Aussi, conformément à la Résolution 2359, une conférence des donateurs est prévue dans les prochains mois pour combler le gap.
Lancement d’une Alliance pour le Sahel
Autre annonce forte issue du sommet de Bamako, c’est celle faite par le président Macron du lancement prochain d’une « Alliance pour le Sahel ». Son objectif est de mobiliser des partenaires engagés et déterminer, une sorte de coalition des bailleurs soutenant le développement du Sahel. Pour ce faire, il a annoncé que des engagements communs autour de cette alliance seront issus du Conseil franco-allemand, prévu le 13 juillet. Dans la même dynamique, le président Macron a déclaré que l’AFD débloquera un montant de 200 millions d’euros pour les cinq ans à venir afin de financer les initiatives visant le développement au Sahel. Les actions prioritaires ciblées à cet effet sont notamment l’Education et la Formation, l’Agriculture et le pastoralisme, lutte contre les efforts du changement climatique et la gouvernance, en particulier l’efficacité de la justice. Pour suivre la bonne exécution de tous ces chantiers, il a annoncé la nomination prochaine d’un directeur régional de cette agence qui sera basée à Ouagadougou. Ainsi, pour lui, « parler de sécurité sans développement est illusoire » car convaincu du fait que la sécurité et le développement sont intimement liés.
Impérieuse nécessité d’une mise en œuvre diligente de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali
A noter que le président français a insisté sur la nécessité de redoubler d’effort sur le volet politique. C’est ainsi que tout en saluant les avancées réalisées dans le cadre du processus de paix au Mali, il a mis l’accent sur l’accélération de la mise en œuvre intégrale de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger. Ce, notamment dans ses aspects liés à la sécurité tels que le désarmement et l’intégration des ex-rebelles. Une dynamique qui selon lui, devrait ouvrir la voie au redéploiement de l’Etat sur l’ensemble du territoire national et la décentralisation. Il n’a pas manqué de saluer l’adoption de la Résolution 2364, renouvelant le mandat de la MINUSMA qui a été invitée à soutenir le redéploiement des forces de défense et de sécurité maliennes réformées et reconstituées au centre et au nord du pays; la protection des civils, y compris contre les menaces asymétriques; et la lutte contrer les attaques asymétriques en défense active de son mandat.
En somme, la rencontre a été celle des annonces fortes. Reste à espérer qu’elles puissent être concrétisées afin de ramener la paix, la sécurité, prospérité et enclencher une véritable dynamique de développement de cet espace.